Qui décide de la valeur d’une œuvre d’art contemporain ?
5 mai 2021Selon les termes explicites d’Adorno, « l’art… a toujours été et demeure une force de protestation de l’humain contre la pression des institutions qui représentent la domination autoritaire, religieuse et autres, tout en reflétant également, bien entendu, leur substance objective ». La question de l’esthétique critique est donc bien de savoir comment l’art est possible, en tant que « force de protestation » contre la domination dans la culture, tout en ne pouvant s’abstenir de refléter la « substance objective » de la domination culturelle. La question que nous nous posons ici est celle de la détermination de la valeur de cet art dit critique. La protestation est-elle encore possible si l’autorité contestée participe à l’estimation de l’oeuvre? Comment arriver à cadrer et à se réapproprier l’art dit naïf par les auteurs africains eux-mêmes… [G. Ahadji]
Alors que certaines œuvres atteignent des prix vertigineux par la spéculation, qui décide de leur valeur ? La profession ou le marché ? Les foires ou les expos ? Les FRAC ou les galeries ? Les musées ou les collectionneurs ? Et de quelle valeur parle-t-on ? Marchande, esthétique, authentique, politique, affective… ? Qui l’attribue ? Les pairs, les experts, les critiques, les conservateurs, les commissaires d’exposition, le public… ?
Il y a une génération, les conversations autour de l’art contemporain portaient le plus souvent sur la question de savoir dans quelle mesure il est vraiment de l’art. Aujourd’hui, elles portent avant tout sur les prix spectaculaires auxquels se négocient certaines œuvres. Voilà qui, au-delà des litanies d’anecdotes sur « qui a vendu quoi à qui et pour combien », appelle une réflexion plus approfondie sur la façon dont s’évaluent les œuvres d’art.
Pour bien répondre à cette question, il faut observer, premièrement, qu’il n’existe pas « une » valeur (économique), mais une pluralité de valeurs, susceptibles de faire d’une œuvre d’art un bien ; deuxièmement, qu’il existe une pluralité d’instances de reconnaissance accordant de la valeur à une œuvre ; troisièmement, qu’il existe une pluralité des temporalités en fonction desquelles une œuvre se valorise ou pas ; et quatrièmement que, en matière de valeur marchande, l’œuvre d’art, et en particulier l’œuvre d’art contemporain, n’échappe pas à la loi de l’offre et de la demande, notamment depuis la tendance à la mercantilisation d’une partie du monde de l’art advenue dans la dernière génération. Mais ces observations ne paraîtront paradoxales que pour ceux qui croient à l’existence d’une valeur intrinsèque des œuvres.
1. La pluralité des valeurs
La valeur marchande, résumée par le prix, n’est que l’une des nombreuses valeurs intervenant dans l’évaluation de l’art, si l’on entend par valeurs les principes au nom desquels sont effectuées des évaluations ou opérés des attachements. Car il y a aussi la beauté, l’authenticité, l’autonomie, la célébrité, le jeu, la moralité, l’originalité, la pérennité, le plaisir, la rareté, la responsabilité, la significativité, la spiritualité, le travail, l’universalité, la vérité, la virtuosité…
« La » valeur (au sens de grandeur, qualité…) d’un objet quelconque, et d’une œuvre d’art en particulier, peut s’attribuer de trois façons : par la mesure, par l’évaluation et par l’attachement. La mesure passe par des codes (les étoiles dont un film est doté dans un journal), par des prix, au sens de récompense (Turner Prize, prix Marcel-Duchamp…), ou par des chiffres, s’agissant par exemple de coter des œuvres d’art. C’est sur cette dernière forme – la mesure chiffrée – que s’est concentrée la science économique, qui réduit la notion de valeur à ce qu’on appelle le « prix ». Cependant, la sociologie et la psychologie sociale s’intéressent non seulement à la mesure mais aussi aux processus d’évaluation, qui prennent essentiellement la forme de mots, et aux attachements, qui prennent la forme de gestes ou de conduites (contempler fréquemment une œuvre, ne pas vouloir s’en séparer…).
Avant donc de répondre à la question de savoir qui décide de la valeur d’une œuvre, il faut se demander de quelle valeur on parle, et sous quelle forme s’exprime cette valorisation. À l’évidence, la « valeur » n’est pas la même selon qu’il s’agit du possesseur d’un tableau hérité d’une personne chère, du critique d’art amené à donner son opinion ou de l’expert invité à produire une estimation avant une vente aux enchères.
2. La pluralité des instances de reconnaissance
Voilà qui nous introduit à une autre dimension de la pluralité : celle des catégories de personnes susceptibles d’attribuer de la valeur à une œuvre.
S’interrogeant sur « les conditions du succès », l’historien d’art anglais Alan Bowness mettait en évidence, dans le cas des arts plastiques, ce qu’il nommait les « quatre cercles de la reconnaissance ». Le premier cercle est composé du petit nombre des pairs (les autres artistes), dont l’avis est capital, et ce d’autant plus que l’artiste est novateur, échappant donc aux critères de jugement traditionnels. Le deuxième cercle est composé des spécialistes, experts, critiques, conservateurs, commissaires d’exposition, qui exercent le plus souvent dans le cadre des institutions publiques. Le troisième cercle est celui des marchands et des collectionneurs, relevant des transactions privées. Le quatrième cercle enfin est celui du grand public – plus ou moins initié ou profane –, quantitativement important mais éloigné des artistes.
Ce modèle en cercles concentriques permet de conjuguer trois dimensions : premièrement, la proximité spatiale par rapport à l’artiste (celui-ci peut connaître personnellement ses pairs, éventuellement ses spécialistes, marchands et collectionneurs, guère son public) ; deuxièmement, le passage du temps par rapport à sa vie présente (rapidité du jugement des pairs, court à moyen termes des connaisseurs et des acheteurs, long terme voire postérité pour les simples spectateurs) ; enfin, l’importance pour l’artiste de la reconnaissance en question, mesurée à la compétence des juges (grande pour les pairs, variable pour les intermédiaires, faible pour le grand public).
Ce modèle met en évidence l’économie paradoxale des activités artistiques depuis l’époque moderne, à partir du moment où l’originalité est devenue un critère majeur de qualité, plaçant l’art en « régime de singularité ». Dans la succession des intermédiaires de l’art, le petit nombre (qui ne paie pas en valeurs monétaires mais en confiance esthétique) est beaucoup plus qualifiant que le grand, sauf si celui-ci advient à long terme (il ne paie alors que tardivement, voire après la mort). Ainsi, un grand artiste peut être reconnu à court terme, à condition que ce soit par quelques-uns de ses pairs ou par des spécialistes très qualifiés (cas de Van Gogh jadis ou de Duchamp naguère) ; si c’est par le grand public (cas de Bernard Buffet hier ou de Jeff Koons aujourd’hui), il aura toutes les chances d’être un artiste sans avenir. Quant à l’artiste reconnu seulement par quelques successeurs et après sa mort, il aura peut-être réussi sur le plan artistique, mais il aura raté son propre passage à la postérité.
3. La pluralité des temporalités
Cette pluralité des temporalités – entre court, moyen et long termes – est un autre paramètre fondamental pour comprendre la spécificité des processus de valorisation en art, et notamment en art contemporain. En effet, dans un domaine où la subjectivité est très présente et où les courants artistiques ne cessent de se succéder et de se multiplier, comment être certain que ce qui vaut aujourd’hui sera encore considéré demain ? Le problème est mineur s’agissant du dernier costume à la mode, mais il devient préoccupant s’agissant d’une pièce payée plusieurs dizaines voire centaines de milliers d’euros. Certes, l’on peut toujours s’en remettre aux évaluations verbales d’un critique d’art pour se rassurer sur la pérennité de la valeur monétaire de l’œuvre, ou encore se contenter de son propre attachement affectif pour se désintéresser de cette question de l’obsolescence du prix. Mais, même sans être un pur spéculateur, aucun acheteur d’une œuvre d’art ne peut y rester totalement indifférent, ne serait-ce que parce que le prix est communément considéré comme un indicateur de la valeur intrinsèque et donc, conséquemment, de la fiabilité du goût de celui qui paie.
Le cas Van Gogh fournit une spectaculaire illustration de cette nécessité de prendre en compte les différentes temporalités commandant l’estimation de la valeur d’une œuvre. Tout le monde connaît l’anecdote de l’unique tableau acheté de son vivant pour quelques centaines de francs, alors qu’un siècle plus tard c’est par dizaines de millions de francs que se règlent aux enchères les passages de ses œuvres en salle des ventes. Pire : une fois patrimonialisées, c’est-à-dire acquises pour le compte d’un musée, ses œuvres deviennent littéralement sans prix, puisque passées au rang suprême d’objets inaliénables ; dès lors, la valeur accordée à ces œuvres n’est plus mesurée que par l’évaluation (à travers les innombrables gloses produites à leur sujet) et l’attachement (manifesté, dans le cas des musées, par le soin mis à les protéger matériellement pendant la conservation, le transport et l’exposition au public). Du très court terme au très long terme, l’on passe ainsi d’une œuvre sans (ou presque) valeur monétaire à une œuvre de si grande valeur qu’elle en devient sans prix. Voilà qui complexifie encore la question de la valeur en matière artistique.
4. La valeur marchande
Les deux exemples ci-dessus – l’unique acquéreur du vivant de l’artiste, pour un prix très modeste, et les ventes aux enchères un siècle après sa mort – illustrent aussi, en matière de valeur marchande, une loi qui vaut tout autant pour l’art que pour n’importe quel objet soumis au marché, à savoir la loi, bien connue, de l’offre et de la demande. En effet, le prix fluctue selon le nombre et le désir des acquéreurs (il est bas lorsque les acquéreurs sont rares ou hésitants, haut lorsqu’ils sont nombreux et décidés), et selon la quantité de l’offre (d’où la tendance des galeristes à organiser une certaine pénurie des œuvres de leurs artistes phares).
Bien acceptée pour l’économie ordinaire des biens et des services, cette loi de l’offre et de la demande tend cependant à heurter le sens commun dès lors qu’il s’agit d’art. Celui-ci est en effet censé posséder une valeur intrinsèque, indépendante des aléas du marché ; et ce, justement, parce que la valeur monétaire est présumée mesurer la « valeur » non monétaire, c’est-à-dire artistique, appréhendée à travers les « valeurs » de beauté, d’authenticité, de signification, etc. D’où le sentiment de gêne, voire de scandale associé à l’évidence de la fluctuation des prix ; voire, dans les pires des cas, à la fixation d’un prix pour une œuvre majeure, comme si sa réduction à la valeur monétaire constituait un rabaissement de sa valeur proprement artistique. Peut-on réduire la valeur des Demoiselles d’Avignon au prix que ce tableau pourrait atteindre si d’aventure il revenait sur le marché ? Non, à l’évidence, tant son influence et la légende qui l’entoure constituent des dimensions fondamentales, et non mesurables, de cette valeur.
C’est que toute transaction marchande implique une mise en équivalence, d’autant plus lorsqu’elle s’opère par un standard aussi commun que l’argent ; et toute mise en équivalence d’un bien artistique risque d’être perçue comme doublement attentatoire à son authenticité, rendant le régime du marché toujours discréditable dans le monde de l’art. D’une part, en effet, dès lors qu’avec une œuvre d’art on n’a pas affaire seulement à un objet matériel mais à une dimension de la personne (telle toile de Picasso, « de la main du maître », charrie avec elle ce que l’on sait de son auteur et de sa biographie tumultueuse), la mise en équivalence porte atteinte à ce qui en elle est irréductible à toute qualification, à toute mesure et, plus encore, au monnayage. D’autre part, pour peu qu’on ait affaire à un artiste reconnu comme grand, la mise en équivalence porte atteinte à l’irréductibilité du singulier, qui est la caractéristique du génie en tant qu’il est au-delà de toute comparaison.
Aussi la médiation marchande, qui n’est qu’un moindre mal lorsqu’il s’agit d’échanger des objets, devient-elle véritablement un « mal » de la part de ceux qui la commettent, voire une « malédiction » pour ceux qui la subissent, dès lors qu’elle s’applique à des singularités : singularité commune de la personne, singularité hors du commun du saint ou du génie. C’est pourquoi toute évaluation monétaire d’une œuvre d’art est particulièrement vulnérable à la discréditation – ce qu’illustrent remarquablement, là encore, les innombrables commentaires suscités par le destin commercial des œuvres d’un Van Gogh. À la limite du sacrilège pour la célébration commune, à la limite de la vulgarité pour l’appréciation savante, une telle monétisation de l’hommage rendu à l’art est souvent perçue comme déplacée : elle peut être abandonnée à ceux qui, en manifestant qu’ils « ont les moyens » (financiers), laissent soupçonner qu’ils n’ont peut-être pas les moyens (éthiques ou esthétiques) de célébrer l’artiste de façon plus appropriée.
5. L’art contemporain et le marché
En matière d’art contemporain, cette méfiance à l’égard du marché, donc de la réduction de la valeur des œuvres à leur prix, s’est beaucoup accentuée ces dernières années du fait de l’arrivée, au milieu des années 1990, de nouveaux acteurs. La montée en puissance des traders et des fonds d’investissement dans les pays avancés, ainsi que des grandes fortunes dans les pays émergents, a créé des acheteurs dotés d’importants moyens financiers, et aux pratiques spéculatives d’autant plus voyantes qu’elles s’appliquent à des catégories d’œuvres elles-mêmes spectaculaires (pensons notamment aux Young British Artists et à leur principal représentant, Damien Hirst), jouant sur des effets transgressifs ou monumentaux susceptibles de plaire immédiatement à des amateurs pas forcément très cultivés.
Auparavant, le marché de l’art contemporain, à quelques exceptions près, restait financièrement modeste, loin derrière l’art classique et l’art moderne. Il s’est aujourd’hui dédoublé : d’un côté, les quelques grandes stars internationales (Cattelan, Hirst, Koons…), soutenues par des galeries de renom, dont les œuvres ne cessent de battre des records longuement commentés par la presse ; de l’autre, le très grand nombre d’artistes encore dans l’ombre ou voués à le rester, connus seulement des spécialistes mais à peu près inconnus d’un public autre qu’initié, et qui n’exposent et, parfois, ne vendent que grâce au solide réseau d’institutions publiques consacrées à l’art contemporain : centres d’art régionaux, fonds régionaux d’art contemporain (FRAC), galeries associatives et, dans le meilleur des cas, musées. Au mieux, ce milieu institutionnel est l’antichambre de la gloire et de la fortune, c’est-à-dire du marché des galeries puissantes, des grands collectionneurs et des foires prestigieuses ; au pire, il restera pour l’artiste le biotope d’une carrière en partie subventionnée et soumise à l’appréciation des spécialistes (critiques d’art, conservateurs et, surtout, commissaires d’exposition, dont l’influence n’a cessé de croître, à l’instar du célèbre pionnier que fut Harald Szeemann), avec comme meilleure perspective celle d’être sélectionné dans une biennale internationale et d’attirer l’attention d’un galeriste ayant acquis la confiance des institutions.
Dans cette nouvelle configuration, l’écart ne cesse de se creuser entre les instances de reconnaissance – le marché privé qui s’expose dans les foires, au premier rang desquelles celle de Bâle, et les institutions publiques qui se cultivent dans les biennales, telle celle de Venise – ainsi qu’entre les temporalités – le court terme du marché des célébrités, le long terme des jeunes artistes prometteurs –, et entre les modalités de fixation de la valeur – valeur marchande ou valeur artistique, faite non plus d’intériorité, de beauté et d’authenticité (comme dans l’art moderne) mais de transgression et d’expérience des limites, de signification socio-politique et de ludisme.
6. L’illusion d’une valeur intrinsèque
Dans ces conditions, la croyance en une valeur intrinsèque des œuvres se trouve ramenée à l’état d’illusion, et ce quels que soient les circuits de reconnaissance. Ceux qui regrettent le manque de pluralisme, voire mettent en doute l’impartialité – ou le goût – des spécialistes proches des institutions publiques, dénient toute crédibilité au système de consécration paramarchand, accusé de ne privilégier que les formes les plus provocatrices de l’art contemporain au détriment de l’art moderne. Ceux qui dénoncent les pratiques spéculatives des grands acteurs du marché, ou le snobisme gouvernant des acquisitions relevant moins de l’amour de l’art que de la « consommation ostentatoire », dénient toute crédibilité aux prix affichés.
Cette question du snobisme, ou de la surenchère dans la dépense, est particulièrement ruineuse pour l’hypothèse d’une valeur intrinsèque des œuvres que viendrait signaler leur prix. En effet, ce prix se trouve en l’occurrence indexé aux ressources du sujet acquéreur plutôt qu’à la valeur supposée de l’objet échangé : acheter alors n’est pas seulement manifester un goût pour une œuvre mais aussi exercer une rivalité avec ses acquéreurs potentiels. Dans la logique d’une économie marchande, c’est là une conduite aberrante ou du moins aléatoire, puisque l’acheteur prend – s’il se comporte en spéculateur – d’énormes risques et perd – s’il se comporte en collectionneur – beaucoup d’argent. Mais elle est parfaitement rationnelle dans une économie du prestige puisqu’il y gagne, en même temps qu’une œuvre d’art, une position exceptionnelle, en tant qu’elle révèle d’exceptionnels moyens à l’intérieur du cercle raréfié de ceux qui peuvent prétendre s’offrir l’œuvre d’un artiste star. Bref : « À ces prix-là, ça ne veut plus rien dire », regrette le désillusionné.
Que les prix ne soient pas de bons indicateurs de la valeur des œuvres constitue donc une faille considérable dans la logique marchande. Et c’est parce qu’une telle discordance attente profondément aux valeurs ordinaires que la critique et la rationalisation en sont si vives. C’est qu’elle touche, plus fondamentalement, à ces deux ordres de valeur que sont, d’une part l’art, avec la nécessaire fixation des valeurs artistiques, et d’autre part l’argent, avec la tout aussi nécessaire fixation des valeurs monétaires.
7. Définir la valeur
Ce cadre étant posé, il devient possible de proposer la définition suivante : la valeur d’une œuvre est la résultante de l’ensemble des opérations par lesquelles une qualité est affectée à un objet, avec des degrés variables de consensualité et de stabilité, par des acteurs aux compétences inégales et aux intérêts divers. Ces opérations sont fonction à la fois de la nature de l’œuvre, de la nature de ses évaluateurs et de la nature du contexte d’évaluation. C’est dire que la valeur de l’art, comme toute valeur, n’est ni objective, ni subjective, ni arbitraire : elle est motivée par les prises qu’offre l’objet à l’évaluation, par les représentations collectives dont sont dotés les individus et par les possibilités qu’offrent les contextes d’activation de ces représentations.
Nathalie Heinich
Mis en ligne sur Cairn.info le 01/04/2017
https://doi.org/10.3917/nect.002.0093


